Dans le sillage des travaux déjà engagés sur la transparence des données d'entraînement et les modèles de rémunération, le Conseil supérieur de la propriété littéraire et artistique (CSPLA) a confié à Tristan Azzi, professeur à l’Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, et Yves El Hage, maître de conférences à l’Université Jean Moulin Lyon 3, une mission autant stratégique que complexe : déterminer la loi applicable, au regard du droit international privé, à l'entraînement des modèles d'IA générative commercialisés dans l'Union européenne.
Ces deux experts se sont vu confier cette mission le 23 avril dernier, le jour même où le gouvernement a annoncé le lancement d’un cycle de concertation entre les représentants des développeurs de modèles d’IA générative et ceux des ayants droit des filières culturelles et médiatiques, piloté par Marc Bourreau et Maxime Boutron. Bien que distinctes, ces deux initiatives poursuivent un objectif commun : garantir la protection des droits des créateurs et titulaires de droits voisins.
Entré en vigueur en août 2024, le Règlement sur l’Intelligence Artificielle (RIA ou AI Act) établit un cadre légal pour le développement, la mise sur le marché et l'utilisation de systèmes d'IA, et ce, dans le respect des valeurs de l’Union européenne. Il impose notamment aux fournisseurs de modèles d'IA à usage général destinés au marché européen, y compris à titre gratuit, de respecter la propriété intellectuelle, même si l'entraînement de leur modèle a été réalisé hors de l'UE. Ils sont ainsi tenus d'identifier et de respecter les réservations de droits exprimées par les titulaires d’œuvres protégées, conformément à la directive (UE) 2019/790 sur le droit d’auteur dans le marché unique numérique, dite directive DSM.
L’objectif de cette approche extraterritoriale est d’éviter que les fournisseurs d'IA opérant dans des pays appliquant des règles de droit d'auteur ou de droit voisin moins protectrices ne bénéficient d’un avantage injuste, et ce, au détriment des créateurs et ayants droit.
Les objectifs de la mission
Assisté par Yves El Hage, en tant que rapporteur, Tristan Azzi a été chargé :
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d'examiner l'état de la réglementation et de la jurisprudence applicables au plan national et international ;
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de présenter les questions de conflits de lois posées par le développement de l'IA en matière de droit d'auteur et droits voisins ;
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d'étudier les différentes options permettant de clarifier le traitement de ces conflits de lois afin de garantir les intérêts des auteurs et titulaires de droits voisins.
Leurs conclusions sont attendues en décembre 2025 lors de la dernière séance plénière de l’année du CSPLA.
Pour mieux comprendre (assisté par l'IA)
Quelles sont les implications du règlement sur l'Intelligence Artificielle (RIA) pour les fournisseurs de modèles d'IA générative en dehors de l'Union européenne ?
Le RIA impose que les fournisseurs d'IA générative respectent la propriété intellectuelle même si l'entraînement du modèle a eu lieu en dehors de l'UE. Cela signifie qu'ils doivent identifier et respecter les droits des œuvres protégées, évitant ainsi un avantage injuste pour ceux opérant dans des pays avec des règles de droits d'auteur moins strictes.